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© AFP/Adrian DENNIS
Le Pr Richard McLaren face aux reporters, le 9 décembre 2016 à Moscou
Le juriste canadien Richard McLaren, dont la deuxième partie du rapport dévoilée vendredi à Londres, a conclu à un programme institutionnalisé de dopage en Russie entre 2011 et 2015, a déclaré à l'AFP ne pas disposer de preuve de l'implication de Vladimir Poutine.
Q: Si les preuves d'un système de dopage ne remontent qu'à l'ancien vice-ministre des Sports Yuri Nagornykh, comment pouvez-vous affirmer que le système est étatique?
R: "Si vous avez un système centralisé, une infrastructure qui utilise différentes parties de différentes organisations sous la tutelle du ministère des Sports, on peut appeler ça un système d'Etat. Je ne crois pas que les Russes soient d'accord avec ça. Pour eux, un système d'Etat impliquerait que des personnes décisionnaires au sein du gouvernement central soient impliquées. Donc seulement dans leur définition, le système n'est pas un système d'Etat. Mais si vous regardez les faits, on sait que le ministère des Sports est impliqué. Ce n'est donc qu'une bataille sur le vocabulaire: système d'Etat, centralisé, systématique, du ministère des Sports... Tout ça veut dire la même chose."
Q: Donc, il n'y a aucune preuve de l'implication de Vladimir Poutine ?
R: "Je n'ai aucune preuve qu'il ait été au courant de quoi que ce soit."
Q: Ni de celle de Vitali Moutko, l'ancien ministre des Sports aujourd'hui vice Premier ministre?
R: "Je n'ai pas de preuve directe pour dire s'il savait."
Q: Qu'en est-il au sujet du Comité olympique russe?
R: "Nous n'avons pas d'information qui implique le Comité olympique russe dans cette conspiration."
Q: Tout cela est arrivé alors que Vitali Moutko était ministre des Sports. Est-il normal qu'il soit l'homme au centre de l'organisation de la Coupe du monde de football en 2018 en Russie?
R: "Ce n'est pas à moi de répondre à cette question, mais à la Fifa. Cela ne fait pas partie de mon enquête."
Q: Etes-vous confiant dans le fait que cela ne puisse plus arriver en Russie ou ailleurs?
R: "Je ne peux rien dire pour ailleurs. Mais en Russie, je ne pense pas que cela puisse arriver encore. En tout cas, pas sous la forme que nous connaissons. Toute la filière qui s'occupait d'enlever les bouchons des échantillons (pour pouvoir les manipuler, NDLR) a été démantelée. Le laboratoire (de Moscou) ne peut plus faire disparaître les échantillons positifs. Je suis persuadé que l'AMA a fait attention à ce point en particulier. Des mesures ont été prises pour les informations transmises au fichier Adams soient véridiques. Le système tel que je le décris n'existe plus."
Q: Pensez-vous que la Russie a fait le ménage?
R: "Depuis mon dernier rapport, j'ai eu l'opportunité de rencontrer plusieurs dirigeants russes. Nous avons discuté de ce point. J'ai été marqué par leur sincérité et leur volonté de changer. C'est une tâche ardue. Tout le monde doit être convaincu, les entraîneurs, les athlètes... Le changement ne va pas se faire en une nuit. La culture doit changer."
Q: Quelles sont les prochaines décisions que vous voudriez voir prises? Dans les autres pays en particulier ?
R: "L'AMA s'est déjà penché sur le Kenya. Ces enquêtes prennent du temps et coûtent cher. Il faut avoir un soupçon bien spécifique pour enquêter dessus. Et ensuite, il faut pouvoir trouver des preuves."
Q: Quelle est l'étendue du dopage dans le football russe?
R: "Nous ne nous sommes pas vraiment penchés particulièrement sur le football dans sa globalité. Ce que nous pouvons dire, c'est que nous avons uniquement des informations sur des footballeurs. Donc nous ne pouvons rien dire sur ce qu'il se passerait dans les équipes ou les championnats. 33 joueurs sont présents dans le rapport, et ils ne sont pas tous russes. Je crois que cela ne représente même pas une équipe. Donc ce n'est pas assez concluant pour en tirer des conclusions."
Q: Est-ce qu'il faudrait se pencher plus spécifiquement sur le football?
R: "Peut-être."
Q: Vous êtes-vous senti menacé ou attaqué pendant votre enquête?
R: "J'ai reçu beaucop d'e-mails haineux, mais je ne me sens pas en danger. Je ne fais pas attention. Je ne crois pas que ma réputation soit terni. J'ai mené une enquête approfondi. Les preuves sont sur le site (de l'AMA)."
Propos recueillis par Tom WILLIAMS et Maxime MAMET.