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"Bête de Somme" et fier de l'être, le boxeur picard Johann Duhaupas tentera samedi dans l'Alabama d'être digne de son idole Rocky pour devenir le premier Français champion du monde des lourds, face à l'Américain Deontay Wilder.
"Si je m'entraîne aussi fort, c'est que j'y crois", expliquait tout récemment à l'AFP ce grand blond de 1,93 m pour 107 kg, à l'issue de six rounds de trois minutes entrecoupés de séances de sac de frappe de même durée. A quelques jours d'affronter Wilder pour la ceinture mondiale WBC, à Birmingham, au coeur de l'Amérique profonde.
Tout près du centre d'Abbeville et de son domicile, dans une petite salle au toit en tôle accueillant deux rings, Duhaupas, 34 ans, refait ses gammes face à son sparring-partner du jour, Maxim, un robuste Ukrainien au nez écrasé.
Pour l'encadrer, son entraîneur de toujours Bruno Vaillant et son "conseiller technique" à la gouaille inimitable Daniel Lorcy, père de Julien "Bobo", champion du monde des légers en 1999, venu inaugurer cette salle en 2000.
"Pense à l'autre (NDLR: Wilder) qui s'entraîne. Deux crochets gauches. Baisse-toi. Marche lui dessus pour rentrer. Les côtes flottantes. Remonte au plexus. Oui, ça ça fait mal!": Lorcy stimule Duhaupas, qui martèle un sac de sable que Vaillant a bien du mal à maintenir.
"Je ne pense qu'à lui", répond le boxeur, au bout de son effort.
"Normalement, l'entraînement pour un Championnat du monde s'effectue sur trois mois, mais entre la signature du contrat et la date du combat, nous n'aurons eu que six semaines de préparation", explique l'entraîneur. "Johann a boxé pour la dernière fois en avril (NDLR: victoire sur Manuel Charr, 9e de la WBC), mais il s'entretient quotidiennement", rassure-t-il.
- Dites 33 -
De fait, Duhaupas (32 victoires en 34 combats) semble doté d'une condition physique au top. Au repos, son coeur bat à 33 pulsations par minute et monte en pointe à plus de 180.
L'Abbevillois aux yeux marron clair et à la voix douce, un serpent tatoué sur le bras gauche, sait qu'il devra être très affûté pour croiser les gants avec Deontay Wilder, invaincu en 34 combats. Des victoires toutes acquises, à deux exceptions près, en moins de quatre reprises.
"Il frappe bien des deux mains, mais il a aussi des défauts", estime le Français. "Il est suffisant et bien trop sûr de lui", renchérit son entraîneur.
Jean-Marc Mormeck, troisième et dernier Français, après Georges Carpentier en 1921 et Lucien Rodriguez en 1983, à avoir eu une chance mondiale en lourds, face à l'Ukrainien Vladimir Klitschko en 2011, avait expliqué que sa défaite expéditive était due en partie à l'émotion suscitée par la foule entourant le ring de l'Arena de Dusseldorf, en Allemagne.
- 'Un flash devant Rocky' -
"Moi, cela ne me gêne pas de boxer devant 20.000 spectateurs. Cela m'est déjà arrivé à l'Arena Roberto Duran à Panama City", rappelle Duhaupas, au sujet de ce 2 avril 2011, quand il bat par KO à la 2e reprise le Bolivien Saul Farah, pour s'emparer du titre des lourds sud-américains.
Peu connu du grand public, Johann, cadet d'une fratrie de quatre frères et fils d'ouvrier, élevé au sein d'une famille peu concernée par la boxe, a eu "un flash à 4 ou 5 ans en voyant Sylvester Stallone dans Rocky!"
"Faute de moyens et de salle sur Abbeville, je n'ai commencé la boxe qu'à 19 ans, je suis devenu vice-champion de France des lourds l'année suivante et suis passé pro en 2004, après seulement 16 combats en amateur (NDLR: dont 14 gagnés)", explique-t-il.
Champion de France des lourds face à Fabrice Aurieng en juin 2013, Duhaupas arrache la ceinture de l'Union Européenne (EBU-EU) quatre mois plus tard, face au Finlandais Jarno Rosberg. Un titre qu'il conserve en avril 2014. Un an plus tard, il se classe 11e en WBC en battant l'Allemand d'origine libanaise Manuel Charr, le sésame pour une confrontation avec Wilder.
On va lui montrer ce qu'est "une bête de Somme", lance Bruno Vaillant avec une pointe d'accent picard.