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Ghani Yalouz, le directeur technique national à une conférence de presse lors des championnats de France, le 24 juin 2016 à Angers
Il a débarqué en 2009 en avouant ne rien connaître à l'athlétisme mais il quitte la DTN sur un bilan historique: par son énergie, son style et les résultats obtenus avec les Bleus, l'emblématique Ghani Yalouz aura marqué de son empreinte son passage à la Fédération.
L'aventure, jugée improbable et à risques il y a 8 ans, se termine avec regrets et nostalgie pour l'équipe de France. Le Directeur Technique National a accompagné pour un ultime tour de piste ses troupes aux Championnats d'Europe en salle à Belgrade avant de prendre à 49 ans ses fonctions le 11 mars à la tête de l'INSEP (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance) et c'est une page glorieuse de l'athlétisme français qui se tourne.
Nommer un ex-lutteur pour guider le haut niveau et la formation des cadres au sein de la FFA était un pari osé. A l'heure des adieux, il laisse un palmarès unique avec comme points d'orgue les exceptionnelles moissons des Euros 2010 (18 médailles) et 2014 (23 médailles dont 9 en or, un record) et l'apothéose des JO de Rio en 2016 avec 6 podiums, du jamais-vu depuis 1948.
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Ghani Yalouz lors de la finale de lutte greco-romaine des Jeux Olympiques d'Atlanta le 21 juillet 1996, où il a remporté la médaille d'argent
Meneur d'hommes et omniprésent, le vice-champion olympique de gréco-romaine en 1996 à Atlanta, DTN de la Fédération française de lutte avant d'intégrer la FFA, a su insuffler un état d'esprit qui a transfiguré et décomplexé les athlètes, loin de l'image traditionnelle du cadre technique, le nez dans les dossiers derrière un bureau. Tous retiennent d'abord ses talents dans le management et sa manière unique de transcender un groupe.
"Il avait un impact psychologique fort avec un côté affectif et rassurant, explique Teddy Tamgho, ex-champion du monde du triple saut (2013). J'ai eu des moments faciles et d'autres difficiles et il a été tout le temps à mes côtés. Il ne sera pas facile à oublier, ça va faire bizarre un stage sans Ghani Yalouz. Parce que Ghani, c'était le seul DTN qui venait aux stages."
- 'Une trace indélébile' -
Pour le hurdler Garfield Darien, l'un des plus anciens présents à Belgrade, Yalouz "a essayé d'inculquer certaines valeurs en équipe de France, une ambiance, un collectif."
"J'ai pu voir les changements, j'ai connu l'avant et l'après, témoigne-t-il. L'ambiance était beaucoup plus individualiste avant. On était chacun dans notre coin. Maintenant, c'est plus convivial, une ambiance d'équipe, un groupe, un collectif et ça a fait ses preuves."
Pascal Martinot-Lagarde, vice-champion d'Europe du 60 m haies, n'a pas oublié ses premiers contacts avec le natif de Casablanca aux Mondiaux de 2012 indoor à Istanbul et les mots qui l'avaient boostés.
"Je me souviens énormément de son discours motivateur, indique PML. Je me souviens de l'adrénaline qu'il nous avait foutue dans le coeur. Ses paroles m'ont énormément motivé. C'est quelqu'un d'humain, de contact, de présent. Il laissera une trace indélébile. Il a fait un travail formidable et a été un soutien inestimable quand j'étais blessé. Il nous manquera, c'est une certitude."
- 'Suicidaire de tout balayer' -
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Renaud Lavillenie (g) célèbre avec Ghani Yalouz sa médaille d'or lors des Jeux Olympiques de Londres, le 10 août 2012
Yalouz le reconnaît lui-même: "Les médailles occultent tout le reste. S'il y avait eu des échecs, ça aurait été difficile pour moi et la Fédération". Et son procès en incompétence en matière d'athlétisme aurait été instruit rapidement.
Rien de tout cela à l'heure du départ. Au contraire, toute la difficulté pour le nouveau président de la FFA André Giraud sera de ne pas dilapider cet héritage au moment de choisir le successeur de Yalouz.
"Nous allons tout faire pour que cet esprit se pérennise. Ce serait suicidaire de tout balayer. Le choix du DTN se fera dans ce sens", assure le dirigeant.
Tamgho résume lui plus crûment les craintes des athlètes: "Je ne sais pas si le prochain aura cette proximité. On appréhende la suite. Ce sera difficile de faire mieux et on se pose des questions."
Yalouz est de son côté déjà prêt pour son nouveau défi. Sollicité par d'autres sports et par l'étranger, il jure que "la seule chose qui pouvait (le) faire partir de l'athlétisme, c'était l'INSEP". Et il attaquera sa mission avec toujours le même credo: "Ne pas rester dans ma tour d'ivoire".