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Cyril Jonard concède un ippon à un jeune judoka de la favela da Rocinha, sous le regard amusé d'autres médaillés français, le 16 septembre 2016
Uchi-mata, o-soto-gari, ippon et franche rigolade sur le tatami: des médaillés français aux Jeux paralympiques ont rencontré vendredi des enfants judokas de la plus grande favela de Rio de Janeiro, une occasion d'apprendre de l'autre, peu importe le handicap physique ou social.
Sortir du village olympique où ils vivent reclus depuis près de deux semaines pour se confronter à la dure réalité brésilienne, loin de l'image carte postale de Copacabana, certains sportifs paralympiques en rêvaient.
C'est au dojo de la Rocinha, la plus grande et la plus connue des favelas de la mégapole brésilienne, que le rendez-vous est pris. Sur les tatamis, une trentaine d'enfants en kimonos blancs ou bleus s'entraînent quand les sportifs arrivent.
"C'est un grand jour car des champions sont là", annonce au micro l'un des plus célèbres judokas du Brésil, Flavio Canto, qui a fondé en 2003 l'institut "Reaçao" pour favoriser l'accès au sport et à l'éducation dans ce quartier très défavorisé gangréné par la criminalité.
Cette dizaine de "champions", emmenée par les judokas Sandrine Martinet, médaillée d'or dans la catégorie des moins de 52 kilos, et Cyril Jonard, ne sont pas tout à fait comme les autres. Malvoyants, sourds, aveugles, paralysés, amputés, ils sont venus montrer que le sport "n'a pas de limite" et qu'il est basé "sur le partage", décrit Sandrine Martinet.
- Une prise, un câlin -
"On est très chanceux d'être là avec eux. Tous les enfants ici n'ont pas la chance d'avoir ce qu'ils peuvent espérer: l'accès aux études, à la santé, un toit sur la tête. C'est hyper important de pouvoir leur donner un petit moment de bonheur", explique à l'AFP la championne paralympique, malvoyante de naissance.
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La judoka française handi Sandrine Martinet donne des leçons de judo aux enfants de la Favela da Rocinha à Rio, le 16 septembre 2016
Pendant plus d'une heure, judokas mais aussi athlètes et nageurs vont participer au cours, discuter avec les enfants grâce à une interprète, faire des démonstrations et s'engager dans des duels de judo très disputés.
Applaudis par leurs camarades, des mini-judokas acceptent de se prêter au jeu et se font bander les yeux pour tenter de mettre au tapis les sportifs. "Je l'ai fait et c'était vraiment trop trop trop difficile", dit Julia, 15 ans. "Ils sont incroyables de réussir à faire du judo sans voir".
"Même les yeux bandés, ils y vont à fond avec des prises de folie", poursuit Sandrine Martinet, mère de deux enfants, émue de les voir ensuite "venir faire un câlin".
- 'Tout est possible' -
Pour ces sportifs qui ont réussi à dépasser leurs difficultés physiques pour faire du sport de haut niveau, il s'agit également de montrer que "tout est possible".
"Cette favela est très grande, très peuplée et tous ces enfants n'ont pas les mêmes choses que nous en France. Il faut leur montrer que le monde du sport s'intéresse à eux", précise à l'AFP la nageuse Elodie Lorandi, double médaillée de bronze au 100 m et au 400 m nage libre
Selon la jeune femme, atteinte d'une maladie orpheline qui lui paralyse une jambe, "c'est bien d'aller voir ce qui se passe dans le monde mais ça doit nous pousser à le faire aussi plus souvent en France car il est important d'expliquer tôt aux enfants ce qu'est le handicap".
Pour Renan, 11 ans, ravi de se battre contre Cyril Jonard, sourd et malvoyant, pas question d'être impressionné: "Ils n'ont pas notre avantage mais je ne sens pas de peine pour eux car ils nous rendent fiers et ils gagnent même en ayant un handicap".
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Le Français Lilian Halouin lors d'une prise de judo avec une gamine d'une favela de Rio, le 16 septembre 2016
Une dernière photo ensemble, une signature sur un tee-shirt, un kimono ou une ceinture, une petite bise, et c'est déjà l'heure de rentrer au village olympique pour les athlètes français.
"Un des plus grands héritages de ces Jeux olympiques et paralympiques, c'est de pouvoir amener au sport des gens qui n'y auraient pas pensé", explique le maître de judo de l'institut "Reaçao", Joao Cardoso. "Cette visite et la médiatisation des Jeux paralympiques vont contribuer à aider des enfants qui n'ont pas de maison ou qui ont un handicap", espère-t-il.