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© AFP/Oliver Lang
Le milieu de terrain allemand, Thomas Hitzlsperger, lors d'une conférence de presse après une séance d'entraînement à Palma de Majorque le 24 mai 2008
L'Allemagne saluait jeudi, unanime, le "courage" de l'ex-footballeur international Thomas Hitzlsperger qui a brisé un tabou en révélant son homosexualité pour contribuer à la lutte contre l'homophobie.
La quasi-totalité de la presse allemande consacrait sa "une" à ce sujet de société, le quotidien Bild, le plus lu d'Europe, titrant en grosses lettres : "RESPEKT !".
Dans une vidéo diffusée jeudi sur son site internet, l'ancien milieu de terrain aux 52 sélections entre 2004 et 2010, qui était surnommé "Der Hammer" (le marteau) en raison de la puissance de son pied gauche, explique, détendu, que sa démarche est surtout "importante pour les homophobes" qui "doivent savoir qu'ils comptent un opposant de plus".
S'expliquant sur son coming-out effectué mercredi sur le site web de l'hebdomadaire allemand Die Zeit, il affirme vouloir aider les jeunes footballeurs homosexuels: "Ils peuvent voir sur la base de mon expérience et sur celle de quelques rares autres que oui, on peut d'un côté être homosexuel et de l'autre un footballeur à succès, ça doit leur donner du courage".
Sources d'inspiration
Tout comme d'autres sportifs lui ont donné le courage d'entrer dans cette démarche d'officialisation: le footballeur a évoqué dans une interview au quotidien britannique The Guardian le basketteur John Amaechi, le rugbyman Gareth Thomas ou le plongeur Tom Daley comme sources d'inspiration.
"+Je suis homo+, cette phrase ne bouleverse plus personne quand elle est prononcée dans le monde du spectacle ou de la politique, mais c'est différent dans le foot", commentait Bild.
"Pour beaucoup de supporteurs et de joueurs, l'homosexualité est toujours synonyme de mollesse, de faiblesse et est proscrite. Thomas Hitzlsperger est le premier footballeur allemand d'envergure à avoir eu le courage de briser le tabou", poursuivait le quotidien allemand.
Dans ce concert de louanges, seul le magazine spécialisé Kicker dénotait, affirmant que "dans une Allemagne ouverte sur le monde, la sexualité ou la religion d'un sportif ne sont pas des thèmes d'actualité".
Le mot "courage" était repris en coeur par de nombreux commentateurs politiques, comme par exemple l'ancien ministre des Affaires étrangères Guido Westerwelle, lui-aussi homosexuel, qui affirme que ce "courage mérite le plus grand respect".
"C'est agréable à entendre mais cela fait partie du problème, bien sûr", a commenté Hitzlsperger dans les colonnes du Guardian. "Mais c'est quelque chose qui doit changer. J'espère sincèrement que nous verrons le moment où plus personne ne mentionnera le courage dans ces circonstances car ce sera considéré comme totalement normal pour un sportif d'évoquer son homosexualité", a-t-il ajouté.
Révéler son homosexualité en tant que sportif professionnel en activité reste difficile. "C'est courageux de la part de Thomas", a souligné Fredi Bobic, son ancien coéquipier de la Mannschaft et directeur sportif de Stuttgart, le club avec lequel Hitzlsperger est devenu champion d'Allemagne en 2007.
"C'était le bon moment"
Mais "faire son coming-out en tant que footballeur professionnel en activité serait une décision encore plus difficile (...) car il peut se passer tellement de choses dans un stade", fait-il aussi remarquer.
"Je pensais déjà le faire il y a deux ans, a-t-il ensuite précisé dans une interview jeudi à la BBC. Mais jouer au football était alors plus important pour moi que des histoires au sujet de ma vie privée. J'ai mis de côté tout ce qui me détournait du football car cela prenait beaucoup de temps et d'énergie."
Retraité des terrains depuis six mois, Hitzlsperger a jugé que pour lui, "c'était le bon moment" pour parler. "Je suis maintenant dans une nouvelle phase de ma vie et je souhaite utiliser ce temps pour évoquer mon expérience de footballeur pro homosexuel", a-t-il expliqué dans son témoignage vidéo.
Et il est désormais prêt à endosser le rôle d'emblème, notamment dans l'optique des Jeux d'hiver de Sotchi. "C'est important de s'opposer aux nations qui discriminent les minorités sexuelles ou autres", affirme-t-il au Guardian. "Cela ne me dérange pas qu'on mentionne mon histoire en lien avec les Jeux car la situation en Russie mérite qu'on en parle. Je suis curieux de voir ce qu'il va se passer".
"Je ne sais pas si le football est si homophobe que l'on dit. Je pense surtout que les gens imaginent que c'est le cas. Les footballeurs gays sont invisibles. On n'en connait aucun et c'est pourquoi je ne sais pas comment les gens vont réagir", a-t-il conclu auprès de la radio anglaise avant de recevoir dans un communiqué le "soutien" de la Fifa pour avoir révélé son "orientation sexuelle".