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Pétri de talent mais longtemps irrégulier, Antonin Rouzier a gagné en maturité pour s'imposer comme l'un des meilleurs pointus de la planète volley lors du Mondial en Pologne où la France est en passe d'accéder aux demi-finales.
La situation relève du paradoxe. Il y a encore quelques mois, le grand et puissant attaquant (2,01 m) ne jouait plus à Cuneo, en Italie, où son entraîneur ne lui faisait pas confiance.
Aujourd'hui, le plus capé (179 sélections) et le plus âgé (28 ans, avec Samuele Tuia ) de la jeune sélection tricolore s'est hissé au sommet des meilleurs marqueurs du Championnat du Monde. Il en était même encore le N.1 à l'issue du deuxième tour.
Sur le terrain, il montre surtout une étonnante régularité et a pris une part importante dans le parcours ébouriffant des Bleus.
"Il a vraiment franchi un cap dans son jeu. Il apporte beaucoup de stabilité à l'équipe. La nouveauté, c'est qu'on le sent très serein, jamais vraiment nerveux même dans les temps faibles", observe Cédric Enard, l'entraîneur des Spacer's de Toulouse, qui l'a connu à ses débuts professionnels en 2004-2005.
"Avant, il était capable de battre une équipe à lui seul, puis de redescendre assez bas. Là au contraire, on sent qu'il a plus de contrôle, de maîtrise sur ce qui se passe. Il est capable de répéter les performances", ajoute le coach français.
- 'Je me lâche' -
André Patin, qui l'a couvé à Asnières-sur-Seine où il s'est révélé en 2006, se souvient d'un joueur doté d'une "épaule incroyable" et d'une "exceptionnelle frappe de balle", mais aussi d'un jeune homme un peu "fragile" et qui "marchait beaucoup à l'affect".
"A Asnières, il avait des amis et se sentait bien. Pour la première fois de sa carrière, il était titulaire et avait des responsabilités. C'est pour cela que ça a marché", souligne Patin.
C'est un peu la même chose avec la sélection française où son rôle d'artilleur est crucial. "Je me lâche avec cette équipe, où tout le monde vit bien ensemble. Je suis plutôt réservé mais je force ma nature. Étant un peu le doyen, j'essaie de rassurer les mecs et de m'imposer", explique Antonin Rouzier qui jouera à Ankara la saison prochaine, après être passé par l'Italie et la Pologne, "le paradis du volley".
Pour André Patin, ces expériences à l'étranger, "où il était confronté à lui-même", l'ont aidé à "murir". "Le fait d'avoir traversé une année difficile à Cuneo l'a aidé à se rebeller lors de ce Mondial", renchérit l'ancien international Frantz Granvorka , aujourd'hui consultant pour la chaîne BeIn Sports.
- Rébellion -
Des épreuves, le natif de Saint-Martin-d'Hères, dans la banlieue de Grenoble, en a traversé beaucoup d'autres. Il y a eu des blessures à répétition, en particulier une entorse à la cheville gauche survenue au Mondial-2010, prélude d'une fin de compétition catastrophique pour les Bleus.
Mais aussi, la terrible frustration de la non qualification au jeux Olympiques 2012 -la deuxième de suite- qui l'avait poussé à s'éloigner, un temps, de l'équipe de France.
Au Mondial polonais, il donne l'impression de vouloir rattraper le temps perdu. "A son âge, il est plus proche de la fin que du début de sa carrière. Cela doit l'aider à se lâcher et à se donner davantage pour l'équipe car il sait qu'il n'aura peut-être plus beaucoup d'occasions", fait valoir Frantz Granvorka .
Se donner en attaque mais aussi en défense, où "il s'investit un peu plus que d'habitude", comme le soulignait le sélectionneur Laurent Tillie avant le départ pour la Pologne. "Antonin qui défend, c'est symptomatique de l'état d'esprit formidable qui règne dans ce groupe", relève Cédric Enard.
Un état d'esprit qui permet à Rouzier et à toute l'équipe de se transcender.