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Faisal Jeylani Aweys, réfugié en Suisse à l'âge de 13 ans et dont l'enfance a été volée par la guerre civile qui ravageait alors son pays, est devenu champion de taekwondo et espère décrocher à 27 ans une qualification aux jeux Olympiques de Rio "et pourquoi pas" la première médaille de l'histoire pour la Somalie.
Médaillé de bronze en -58 kg aux derniers Championnats d'Afrique en Tunisie, le jeune homme qui enseigne son sport dans un club de Lausanne occupe la 60e place au classement mondial. "J'étais récemment 56e, mais je n'ai pas disputé assez de tournois internationaux, donc j'ai un peu reculé", explique-t-il dans un français parfait, avant d'accepter de se replonger dans un passé douloureux.
Privé de sa maman, décédée d'un cancer, le gamin, en compagnie de l'une de ses deux soeurs, doit quitter la Somalie alors en plein chaos, et est accueilli en Suisse, à Vevey, par sa grand-mère. Contrairement à certains boat-people au destin funeste, c'est en avion qu'il rejoint l'Europe: "J'ai découvert une vie, celle d'un adolescent, car jusque-là, ma vie n'avait consisté qu'à fuir".
En souvenir d'une mère qui avait pratiqué elle-même ce sport, Faisal s'initie au taekwondo: "Ma professeure de français connaissait un peu mon histoire et m'a dit +je te conseille de t'y mettre+. Par respect pour elle, j'y suis allé. C'était aussi un moyen de me rapprocher de ma mère".
Il est doué. Rapidement ceinture noire, il enchaîne les formations pour pouvoir arbitrer et enseigner, et surtout combattre. "Pendant longtemps, je combattais au nom de mon club, pas pour la Suisse car je n'en ai pas le passeport".
- Au début 'pas très chaud' -
En 2010, jeune marié et père d'un premier enfant, il arrête la compétition, "car être papa et athlète exige qu'on devienne un peu trop égoïste".
Mais la visite à l'Open de Lausanne du secrétaire général du Comité national olympique somalien, Duran Farah, va tout changer: "Il cherchait des athlètes de haut niveau. Au début je n'étais pas très chaud, mais en fait je n'avais aucune excuse pour ne pas combattre, donc j'ai dit oui".
En 2013, Faisal, qui a déjà remporté des tournois en France, en Suisse et en Allemagne, dispute à Alexandrie (Egypte) son premier tournoi en dehors d'Europe sous les couleurs de la Somalie, au sein d'une délégation de huit athlètes, dont deux "Européens".
Avec sa 4e place, il considère que "c'était un très bon tournoi, car cela nous a permis de voir que nous n'étions pas à la traîne et qu'on avait le niveau".
"Le travail a payé", ajoute-t-il, dans une langue riche et précise, où les mots "humble" et "noble" reviennent souvent: aux championnats d'Afrique, en Tunisie, il bat des athlètes du Gabon et du Mozambique, et ne s'incline qu'en demi-finale face au N.1 égyptien. Sa médaille de bronze lui donne des idées, et grâce à une bourse pour athlète de la Solidarité olympique obtenue en 2012, il peut espérer participer aux Jeux de Rio.
- D'abord les Jeux africains -
Mais pour décrocher un sésame automatique, il doit d'abord s'imposer lors des prochains Jeux africains, en septembre au Congo-Brazzaville. Il lui resterait encore les tournois qualificatifs, ou la possibilité de recevoir une invitation. "Mais j'entends aller aux Jeux par mes propres moyens", lance-t-il. Autrement dit par une qualification directe.
Pourrait-il alors rêver d'offrir une première médaille olympique à ce pays de 10 millions d'habitants, à la situation politique plus qu'instable et où il n'est jamais encore retourné? "Tout est possible, sourit-il. On a vu des grands champions comme (l'Américain) Steven Lopez , double champion olympique, perdre au premier tour (en 2012 à Londres contre un Azerbaïdjanais, ndlr). Et en 2008 comme en 2012, des +petits+ pays comme l'Afghanistan ou l'Iran ont remporté des médailles. Donc, oui pourquoi pas..."
Faisal rejoindrait alors au panthéon du sport somalien l'idole d'un pays, le coureur de demi-fond Abdi Bile, champion du monde du 1500 m en 1987 à Rome, mais seulement 6e aux JO d'Atlanta en 1996. Ou encore "le plus Somalien des Britanniques", "Mo" Farah, né comme lui à Mogadiscio, et double champion olympique à Londres, sur 5000 et 10.000 m.
Champion d'Europe des -58 kg en 2021 et 2022. Médaillé de bronze olympique de cette catégorie aux JO de Paris en 2024. ... |
Champion olympique des 58 kg en 2024 et champion du monde des 54 kg en 2023. Champion d'Asie des 54 kg en 2022 (2eme en 2024). Champion d'Asie junior en 2019 des 45 kg. ... |