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Exit le maquillage de "vieille femme", et slip de bain plutôt que monokini... Le Japonais Atsushi Abe cherche "la bonne dose de masculinité" pour convaincre les sceptiques que les hommes ont toute leur place en natation synchronisée, discipline féminine par excellence.
Abe, 32 ans, va représenter le Japon dans la catégorie du duo mixte qui figure pour la première fois aux Championnats du monde de natation, le mois prochain en Russie.
Le jeune Tokyoïte s'est pris de passion pour cette spécialité après avoir vu le film "Waterboys", comédie à succès nippone de 2001 sur des lycéens qui s'enrôlent, d'abord à leur corps défendant, dans une équipe de natation synchronisée.
"Il y a déjà eu beaucoup de nageurs masculins dans cette discipline. Certes ils n'ont pas connu la célébrité mais n'en ont pas moins persévéré", souligne Abe à la sortie d'un entraînement avec sa partenaire Yumi Adachi.
"Puisque le duo mixte vient de gagner ses lettres de noblesse aux Mondiaux, je veux montrer ma profonde reconnaissance à tous ceux qui m'ont précédé", explique modestement le nageur.
- Stéréotypes -
"C'est grâce à eux que les hommes ont été acceptés en natation synchronisée. Maintenant, en tant que camarade, j'aimerais aider à faire évoluer la discipline".
En décembre 2014, la Fédération internationale de natation (Fina) a officialisé la nouvelle attendue depuis des mois: le duo mixte de natation synchronisée fera son entrée au programme des Championnats du monde disputés à Kazan du 25 juillet au 1er août.
Abe sait bien que des voix se sont élevées en Russie pour critiquer cette décision, dans les milieux de la natation et jusqu'au ministre des Sports, de crainte de perdre l'hégémonie sur une discipline que ce pays domine de la tête et des épaules. Les nageuses russes ont raflé tous les titres olympiques de la spécialité depuis 2000.
Une controverse livrée sur fond de stéréotypes machos et d'escarmouches politico-sportives avec les États-Unis.
"Je pense que les hommes vont venir plus nombreux à la synchro. Il est de mon devoir de les aider à comprendre que tout le monde peut le faire", plaide le Japonais.
- Nouvelle vague -
Reste qu'Abe n'est pas au bout de ses peines.
Techniquement déjà. "La respiration", sourit-il lorsqu'on lui demande ce qui est le plus dur.
"Répéter les figures, c'est bien, mais quand on a fini de les enchaîner je suis toujours à bout de souffle. Yumi et moi améliorons l'endurance à l'entraînement et nous progressons, nous dit-on, mais il y a encore du chemin à faire", admet l'espoir nippon.
Et puis il y a son look, cible de critiques lors des Championnats de natation du Japon à Tokyo récemment.
Abe a dû se faire ratiboiser après avoir arboré une coiffure gominée ridicule, de l'aveu même de sa coach Masami Hanamure, pendant le numéro du duo mixte inspiré du "Fantôme de l'Opéra".
"En fait, on cherchait une sorte de look à la Dracula, en mignon. Il s'est donc laissé pousser les cheveux et les a pommadés en arrière. L'horreur. Il a fallu l'expédier chez le coiffeur en catastrophe, le pauvre", plaisante-t-elle.
Comme si la coupe "draculesque" ne suffisait pas, Abe a suscité l'embarras à cause de son maquillage - "qui le faisait ressembler à une vieille femme", dixit sa coach -, et d'un choix de maillot malheureux qui le rendait impossible à distinguer de sa partenaire.
"On avait l'impression qu'il y avait deux filles dans la piscine", confesse Hanamure.
"Pour être honnête, nous tâtonnons. Ce serait peut-être mieux de lui faire porter un simple slip de bain pour montrer ses muscles. Mais il n'est pas aussi râblé que (l'Américain) Bill May . Il faut qu'il aille faire de la musculation", préconise-t-elle.
Atsushi Abe passe dix heures dans le bassin et avale 3.000 calories chaque jour pour accroître sa masse musculaire.
Mais il ne se laisse pas décourager: "C'est une histoire de coups d'essai et d'erreurs. On cafouille pour trouver la bonne formule, la bonne dose de masculinité, mais je vais y travailler".