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La championne olympique Camille Muffat est revenue samedi à Nice dans un entretien à l'AFP sur les motivations qui l'ont conduite à arrêter sa carrière à seulement 24 ans, estimant "qu'être bien dans sa tête, c'est arrêter".
Q: Qu'est-ce qui a motivé votre décision d'arrêter la natation ?
R: "Après un différend avec mon entraîneur il y a quelques jours, j'ai réfléchi à ce que je voulais faire et, tout simplement, je ne me voyais pas revenir le lendemain matin me remettre à l'eau comme je le fais tous les jours depuis douze ans".
Q: Ce différend avec Fabrice Pellerin, votre entraîneur, est l'élément déclencheur ?
R: "Oui, tout à fait. Cela ne faisait pas des mois que je pensais arrêter, au contraire, je m'entraînais très bien. J'avais réalisé récemment mes meilleures performances de l'année et j'étais tout à fait dans la dynamique des championnats d'Europe de Berlin".
Q: Quelle est la nature de ce différend ?
R: "Cela reste entre nous, les gens n'ont pas à la savoir. Ce que le grand public voit de notre discipline, c'est une minute de course. Il n'a absolument pas conscience de tout ce qu'il y a derrière. On s'entraîne huit heures par jour et moi, simplement, aujourd'hui, je ne me voyais plus continuer à nager comme ça et à avoir la même relation. Je ne me voyais pas non plus partir, changer d'entraîneur, je n'aurais pas été heureuse".
Q: On reste étonné par le caractère soudain de votre décision ...
R: "Pour moi, c'était le moment d'arrêter. Je n'ai aucun regret. Depuis Londres où j'avais touché le Graal avec des médailles olympiques, ce n'était que du bonus, en plus avec moins de pression. J'aurais pu continuer des années".
Q: En avez-vous discuté avec votre entraîneur ?
R: "Oui, et lui aussi pense que j'aurais pu continuer. Je n'ai jamais eu aucune blessure. Nous avons toujours eu l'intelligence d'ajouter progressivement des entraînements. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que la natation, ce n'est pas seulement s'entraîner. Il faut aussi être bien dans sa tête. Et moi, aujourd'hui, être bien dans ma tête, c'est arrêter. Il ne faut pas être triste pour moi, j'ai plein de choses à faire dans la vie".
Q: Y a-t-il eu une certaine lassitude après plus de dix ans passés à nager tous les jours et avez-vous le sentiment d'être passée à côté de pas mal de choses ?
R: "Non, j'ai toujours assumé ce que je faisais. Je me suis toujours dit que ce que j'obtenais avec l'entraînement, les médailles, la notoriété, valait mille fois ce que je ratais. J'ai commencé à nager à l'âge de 7 ans, et dès 9-10 ans je nageais déjà tous les jours. Mais j'aimais ça, et j'aime toujours ça ! Ma décision n'a rien à voir avec un ras-le-bol de s'entraîner dur. Aujourd'hui, j'ai le recul de dire que c'est grâce à cette souffrance que j'ai eu ces résultats".
Q: On ne peut s'empêcher de rapprocher votre cas de celui de Yannick Agnel , parti lui aussi après une rupture avec Fabrice Pellerin.
R: "Yannick, il a eu son histoire avec Fabrice Pellerin, et moi la mienne. Elles ne se terminent pas de la même façon puisque lui est parti s'entraîner ailleurs. Son choix est différent du mien. Je n'ai aucune raison d'avoir de la haine ou de l'amertume envers Fabrice Pellerin. Au contraire, c'est grâce à lui que j'en suis arrivée là. Il m'a pris dans son groupe quand j'avais douze ans. Il aurait aimé continuer, il est déçu, mais il comprend mon choix et le respecte".
Q: Vous avez pensé à votre reconversion ?
R: "Oui, j'y pensais un peu déjà quand je nageais mais en fait pas sans m'y attarder trop. Je nageais à plein temps. Si j'y avais trop pensé, je me serais moins impliquée dans la natation. Or, quand je fais quelque chose, je le fais à fond, je crois que je le prouve encore aujourd'hui avec cette décision".
Q: Vous avez tout de même des pistes, des projets ?
R: "Oui, depuis quelques jours j'ai commencé à réfléchir. J'ai pris le temps de prévenir mes partenaires, la Fédération française de natation, mon club, l'Olympic Nice Natation, la Ville de Nice, mes sponsors... Je vais voir ce que je peux leur apporter, dans quels domaines... Certains ont déjà des projets pour moi. J'ai déjà eu des réponses. Je vais prendre des vacances et je verrai après. J'aurai sans doute des propositions farfelues. Il faudra faire le tri. Mais j'ai conscience que j'ai une certaine valeur. Je peux apporter des choses, notamment à ma ville de Nice ou à la Fédération. Je vais voir avec mon agent et mes proches".
Q: Souhaitez-vous entraîner un jour à votre tour ?
R: "Non, ce n'est pas pour moi. Quand on a poussé aussi loin que moi l'exigence, je crois que j'aurais du mal à être tolérante..."