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Dans une salle de sport délabrée de Khartoum, une dizaine de garçons en maillot de corps s'empoignent sous le regard critique de leur entraîneur, un jeune Japonais dont la mission est d'en faire des champions de lutte en vue des JO-2020.
Musclés et agiles, ces jeunes membres de la tribu Nouba ont appris à lutter en même temps qu'à marcher.
Les lutteurs "sont tous en excellente condition physique", reconnaît leur entraîneur. Mais c'est à peu près tout. Chargé par l'ambassade du Japon à Khartoum de bâtir une équipe capable de briller aux jeux Olympiques de Tokyo, dans cinq ans, Kosuke Sunagawa a encore du travail.
Derrière le coach de seulement 23 ans, deux lutteurs s'affrontent sous les yeux de leurs coéquipiers, avides d'apprendre de nouvelles techniques.
La lutte est un sport solidement implanté au Japon, qui a récolté six médailles, dont quatre en or, lors des derniers Jeux en 2012.
L'intérêt japonais pour les lutteurs Noubas est venu d'un diplomate nippon en poste à Khartoum, féru de lutte, qui a un jour décidé de défier les champions locaux. C'était en 2013 et Yasuhiro Murotatsu a perdu tous ses combats. L'évènement avait attiré des centaines de spectateurs.
Tokyo a alors sauté sur l'occasion de créer des liens avec un pays peu ouvert aux relations internationales et que le Japon considère comme un îlot de relative stabilité dans une région troublée, malgré l'existence de conflits armés dans des régions soudanaises reculées.
- Dans la poussière -
Créer de toute pièce une équipe de haut niveau dans un pays qui ne compte qu'une seule médaille olympique (en 2008 en athlétisme) n'est pas chose aisée, mais l'ambassade japonaise considère que ce partenariat de 50.000 dollars est un bon investissement.
Reste aux lutteurs de M. Sunagawa à apprendre les règles de la lutte libre, l'un des deux types de lutte pratiquées aux jeux Olympiques.
Dans la tradition Nouba, les pugilistes s'affrontent sur du sable et la victoire est accordée à celui qui parvient à jeter son adversaire au sol.
Aux JO, chaque prise équivaut à un certain nombre de points et la victoire revient à celui qui cloue les épaules de son adversaire au tatami.
"Je fais mon possible pour développer leur potentiel, en leur offrant des programmes personnalisés", explique le coach "Suna".
Pour les lutteurs, c'est une chance de pouvoir développer un talent qu'ils cultivent depuis l'enfance, à force de regarder les champions s'affronter dans le quartier miteux de Hajj Youssed, à Khartoum, où une foule assiste chaque vendredi à des combats qui soulèvent des nuages de poussière.
Un vendredi, Wissam Mohammed est assis au premier rang. Ce boucher de 18 ans a été choisi par son entraîneur pour se rendre au Japon en avril, comme trois autres jeunes lutteurs et deux apprentis entraîneurs soudanais.
"Je veux participer aux jeux Olympiques en 2020. Si Dieu le veut, je rapporterai une médaille de bronze et je ferai monter le drapeau du Soudan", assure-t-il.
- 'Vieille tradition' -
Lors de son premier passage au Soudan, en novembre, Kosuke Sunagawa avait estimé que les choses s'étaient bien passées. Mais à son retour en février, il s'est rendu compte qu'un certain nombre de ses élèves avaient tout simplement arrêté de s'entraîner.
Très pauvres comme l'ensemble des Noubas de Khartoum, originaires du Kordofan-sud dévasté par des années de guerre civile, les jeunes lutteurs avaient dû retourner travailler pour subvenir à leurs besoins.
Outre le facteur social, le développement de la lutte au Soudan se heurte à un problème structurel.
"On manque d'installations", reconnaît Ahmed Hashim, secrétaire général du Comité olympique soudanais. "Tout ce que nous avons, c'est la très vieille tradition de la lutte Nouba".
Dans la salle décrépie, la moitié des fenêtres sont brisées et l'air conditionné est un doux rêve.
Cela reste néanmoins la meilleure installation disponible et cela n'empêche pas M. Hashim de viser haut.
Son premier objectif est de qualifier, pour la première fois de l'histoire, des lutteurs soudanais pour les JO -en 2016 à Rio ou 2020 à Tokyo. "Et sur le long terme", confie-t-il, "on veut que la lutte devienne un sport bien établi au Soudan, qui tente régulièrement de décrocher des médailles".
Championne olymppique des -57 kg en 2024. Championne du monde de la catégorie en 2021, 2022 et 2023. Médaillée d'or aux Jeux d'Asie et championne d'Asie de la catégorie en 2022 (2eme en 2024). ... |