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Le médecin qui a dénoncé les dangers du football américain et qui a inspiré le film "Concussion" où il est incarné par Will Smith, recommande l'interdiction aux enfants de ce sport aussi spectaculaire que violent.
"Je ne laisserai pas mon fils jouer au football américain: comment pourrais-je dire à d'autres parents qu'ils peuvent laisser leurs enfants pratiquer ce sport?", a expliqué Bennet Omalu dans un entretien à l'AFP.
Le docteur Omalu a eu récemment cette discussion avec un père de famille: pas n'importe qui puisqu'il s'agit de Will Smith, l'acteur qui l'incarne dans le très attendu film "Concussion" ("Seul contre tous" en français), produit par Ridley Scott, qui sort en fin de semaine aux Etats-Unis et en mars en Europe.
"Will (Smith) n'était pas conscient des risques de blessure et il pense que beaucoup d'autres parents sont dans le même cas", relève Bennet Omalu.
En 2015, onze adolescents évoluant dans l'équipe de leur lycée ont trouvé la mort sur un terrain, ce qui fait du football américain de loin la discipline la plus dangereuse pour les jeunes Américains.
Bennet Omalu, médecin-légiste et neuropathologiste nigérian de naissance, est le premier à avoir établi que les chocs répétés à la tête que reçoivent les joueurs de la NFL pouvaient conduire à leur mort prématurée.
En identifiant au début des années 2000 que d'anciens joueurs professionnels, comme Mike Webster, souffraient d'un trouble cérébral, l'encéphalopathie traumatique chronique (ETC), le Dr Omalu est devenu le cauchemar de la toute-puissante et richissime NFL, organisatrice du championnat de football américain en Amérique du nord.
- Epidémie -
Attaquée en justice par 5000 anciens joueurs ou leurs familles, la NFL a fini par mesurer l'étendue du problème.
Elle va débourser près d'un milliard de dollars (919 millions d'euros) pour financer des programmes de recherche et indemniser des joueurs blessés sur le terrain ou souffrant de pathologies allant de la maladie d'Alzheimer à la maladie neurodégénérative de Charcot.
Mais pour le docteur Omalu, ce n'est pas encore suffisant: pour éviter une épidémie comparable à ses yeux aux ravages du tabac, il faut supprimer tout risque en interdisant aux enfants de jouer au "football", comme ce sport est désigné aux Etats-Unis.
"Les familles et les parents doivent savoir que si leurs enfants continuent de jouer au football américain comme il se joue actuellement, ils courent un risque significatif de dommage cérébral", a-t-il expliqué.
"Cela peut parfois se manifester des années plus tard, des décennies plus tard même, jusqu'à 40 ans plus tard", a rappelé l'expert.
"La société moderne évolue (...) et dans le cadre de cette évolution, on abandonne des choses pas forcément intelligentes qu'on faisait dans le passé pour adopter des choses plus intelligentes", a insisté le Dr Omalu.
- 'Manipulation de la science' -
"Sachant ce que l'on sait maintenant --comme on l'a fait pour le tabac, l'alcool ou même le sexe--, c'est le devoir moral de notre société de protéger les plus vulnérables, à savoir les enfants. Si l'on identifie un risque, quelque chose de nocif, cela serait imprudent de continuer à exposer nos enfants à ce risque, vous ne croyez pas?", a-t-il martelé.
Sa campagne se heurte à une certaine hostilité dans un pays où le football américain est le sport-roi, de loin le plus regardé à la télévision, plus encore que le basket-ball et le baseball.
"Un enfant ne comprend pas les implications de ce qu'il peut faire, un adulte si", s'est-il emporté.
Sa colère ne retombe pas lorsqu'on évoque les statistiques de la NFL qui font état d'une baisse de 35% du nombre de commotions cérébrales recensées sur les trois dernières années grâce notamment à une modification des règles qui proscrivent désormais les chocs casque contre casque.
"C'est une manipulation de la science (...) Le nombre de commotions cérébrales n'est pas significatif si le nombre de coups reçus à la tête reste identique, ces coups sur des années peuvent se chiffrer en milliers et les dommages sont irréversibles", a regretté le Dr Omalu.