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A deux mois de Roland-Garros, la Fédération française (FFT) attend avec un mélange d'anxiété et de fatalisme une énième décision judiciaire qui pourrait suspendre les travaux d'extension du stade pendant de longs mois et fragiliser le tournoi phare du tennis français.
En cause cette fois-ci, les permis de construire délivrés par la Mairie de Paris à la FFT en juin dernier, attaqués en référé par trois associations d'opposants à un projet qui prévoit la construction d'un court semi-enterré dans une partie technique des serres d'Auteuil.
L'audience, tenue le 9 mars, s'est déroulée mi-chèvre mi-chou pour la FFT, avec un rapporteur visiblement convaincu par la plupart des 57 points soulevés par les requérants, opposés à toute construction sur un site classé monument historique. "Il suffit que le juge en retienne un pour qu'il suspende les travaux avant le jugement au fond", regrette Me Emmanuel Vital-Durand, avocat de la FFT, qui attend un verdict dans les jours à venir.
Cette interruption, presque attendue, des travaux débutés en octobre s'enchaînerait à une première suspension de trois mois - en cours jusqu'au 31 mars - actée après une autre action en référé le 18 décembre. Dans cette affaire distincte, ce sont les descendants de Jean-Camille Formigé, architecte des fameuses serres d'Auteuil, qui attaquent le projet d'extension devant le tribunal de grande instance (TGI) de Paris au nom du "droit d'auteur".
Dans les deux cas, les litiges seront ensuite jugés sur le fond, dans plusieurs mois, lors de procédures pour lesquelles le conseil de la FFT est plus optimiste. "Au Conseil d'Etat ou en cassation, le débat ne sera plus de savoir si le site aurait pu être ailleurs mais juste si les permis de construire sont valides", note Me Vital-Durand.
- Le statut 'Grand Chelem' -
Pendant ce temps, le chantier piétine et Roland-Garros reste enserré dans un espace insuffisant. "On n'offre pas les services que les joueurs et les spectateurs sont en droit d'attendre, tandis que les autres tournois prennent de l'avance", déplore Jérémy Botton, promu directeur général de la FFT après le limogeage de Gilbert Ysern début février. De là à agiter le chiffon rouge de la perte du statut Grand Chelem... "On n'est pas menacés pour l'instant, mais si les travaux sont totalement compromis, alors oui", reprend le nouveau DG de la FFT, évoquant les concurrents qataris ou chinois.
Une idée qui met Daniel Chausse hors de lui. Président de la commission des travaux de Roland-Garros, il retrouve ses accents d'avocat pour défendre un projet "légal, beau et environnemental".
"C'est nous qui sommes les défenseurs de l'environnement", prétend-il, arguant que le projet de la FFT, qui prévoit de faire passer la surface du site de 8,5 à 12,5 hectares, pour un coût, autofinancé à 95%, de 350 à 400 millions d'euros, "embellit le site des serres" grâce au court conçu par le paysagiste Michel Corajoud et l'architecte Marc Mimran.
Selon les plans de la FFT en effet, ce court semi-enterré à l'apparence de serres viendrait remplacer un ensemble de locaux techniques en aluminium bâtis en 2001 et laissés dans un état de quasi abandon.
Il serait par ailleurs complété par un espace vert supplémentaire qui viendrait remplacer l'actuel court N°1 et "sortirait les serres de Formigé de leur clandestinité", selon Daniel Chausse. Quelque 130 arbres seraient plantés pour faire passer leur total à 660. On est loin, selon lui, des clichés véhiculés depuis le début du projet sur la destruction d'un monument classé.
Après sept recours en justice depuis 2011, la FFT redoute surtout de voir, si les actions retardent trop ses plans, toute l'économie du tennis national s'éroder lentement. La quinzaine de Roland-Garros et ses 200 millions d'euros de chiffre d'affaires représentent en effet l'essentiel des revenus de la fédération, donc de ses 7.800 clubs affiliés.