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Cela pourrait n'être qu'une question d'heures: si Tottenham, deuxième de Premier League, ne bat pas Chelsea lundi soir (21h00), le petit club de Leicester sera assuré d'un titre historique de champion d'Angleterre, une performance inimaginable pour cet habituel anonyme du football anglais.
Le premier intéressé, l'entraîneur italien Claudio Ranieri, a juré qu'il ne pourrait pas regarder ce match crucial et qu'il connaîtrait le résultat après tout le monde.
La justification semble tout aussi improbable que l'épopée de son équipe: un aller-retour en Italie pour manger avec sa mère nonagénaire!
A l'heure du match "je serai dans l'avion du retour. Je dois voir ma mère. Elle a 96 ans et je voudrais déjeuner avec elle", a affirmé l'Italien de 64 ans dimanche soir, après le nul sur le terrain de Manchester United (1-1) qui a permis à Leicester de compter provisoirement huit longueurs d'avance sur Tottenham.
Les 'Foxes' ont laissé aux spectateurs le temps de s'habituer à l'extraordinaire: la première fois qu'ils ont pris les commandes de la Premier League c'était après 13 journées, en novembre.
Depuis, ils n'ont rétrogradé que deux fois, au soir de la journée suivante, puis entre la 19e et la 23e. Trop facile? Il ne faut surtout pas sous-estimer l'incroyable exploit que sont en passe d'accomplir les hommes de Ranieri.
- Anonymes devenus stars -
D'accord, ils ne seraient pas le premier champion inattendu de l'histoire du foot moderne: Montpellier, sacré au nez et à la barbe du Paris SG fraîchement passé sous pavillon qatari en 2012 en France, l'Atletico Madrid, qui a mis fin en 2014 à la bicéphalie du Championnat d'Espagne, les ont précédés dans le rôle.
Dans l'histoire de la Premier League, on n'a toutefois plus vu pareille incongruité depuis 1978 avec le premier sacre du promu Nottingham Forrest.
C'est vrai, les habituels grands noms du football anglais, Liverpool, Manchester United, Manchester City et surtout le champion en titre, Chelsea, n'ont pas tenu leur rang cette année, végétant une partie de la saison qui dans le ventre mou, qui proche de la zone de relégation.
Mais quel performance de Leicester! On les pensait incapables de résister au Boxing Day? Ils ont franchi l'obstacle sans vaciller. Ils ont encaissé deux buts par match pendant les neuf premières journées? Claudio Ranieri a actionné des ressorts inespérés - en promettant des pizzas en récompense à la première 'clean sheet' (match sans but encaissé) de la saison - pour rectifier le tir: sur les neuf derniers matches disputés, ils n'en ont pris que 5.
Leur recrutement, piloté par un ancien prof de sport assisté par ordinateur, Steve Walsh, est un modèle d'opportunisme et d'efficacité: les hommes forts de la saison de Leicester, ce sont un enragé longtemps oublié du foot anglais, Jamie Vardy, deux anonymes de la formation à la française (Riyad Mahrez et N'Golo Kanté) et un "fils de" (le gardien Kasper Schmeichel).
Preuve de la réussite des Foxes: pour la presse anglaise, Vardy, Mahrez et Kanté, occupent, dans cet ordre, le podium des meilleurs joueurs de l'année.
- Trois défaites -
Leur collectif ne s'est pas délité sous la pression de la fin de saison, pas même face aux habituels cadors de la Premiere League. Seul Arsenal, deux fois, et Liverpool, ont réussi à battre les 'Foxes' cette saison: trois défaites, c'est autant que le champion de la saison précédente, Chelsea en 2014/15. Manière de dire que l'équipe de Leicester ne doit son succès qu'à elle-même.
Et si Tottenham gagne à Chelsea? Leicester, ville davantage habituée aux victoires en rugby et au frisson de la relégation en foot, aura alors encore deux matches pour être titré: à domicile contre Everton samedi puis sur le terrain de Chelsea le 15 mai pour la 38e et dernière journée.
Ce serait un sacré morceau d'histoire pour les hommes de Claudio Ranieri, lui-même jusqu'alors estampillé 'loser': dans un football moderne où le système des transferts a toujours asservi la réussite sportive à la puissance financière, ils ont démontré avec brio qu'il y avait encore la place pour l'incertitude et les exploits.