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La passion de la compétition, l'ivresse de la victoire et le retour sur investissement: en revenant en Formule 1, Renault vise surtout des retombées en terme de notoriété, et donc de ventes, dans les pays émergents.
Le Grand Prix d'Australie, première manche (sur 21) de la saison 2016, dimanche à Melbourne, sera le théâtre du grand retour de la firme au Losange en tant qu'acteur à part entière (châssis et moteur) dans la discipline reine des sports mécaniques.
La livrée jaune, couleur sous laquelle Renault a connu la gloire en F1 à partir de la fin des années 1970, a été dévoilée mercredi, mais les patrons de l'équipe rebâtie à la hâte sur les décombres de Lotus ont tempéré les espoirs, parlant d'une nécessaire période de "reconstruction".
"Nous ne sommes pas seulement de retour en F1 parce que nous pensons être compétitifs à un haut niveau et, à terme, pour gagner (...): c'est du +business+", a expliqué le PDG du constructeur français, Carlos Ghosn, début mars au Salon automobile de Genève.
Et d'exposer la stratégie de son entreprise, qui vient de boucler un exercice budgétaire 2015 sur un bénéfice net de près de trois milliards d'euros: "Dans les cinq ou six années à venir, nous allons mener une offensive importante sur les marchés émergents" à fort potentiel de croissance.
Renault vient en effet d'inaugurer une première usine en Chine. Sa nouvelle petite voiture "low-cost", la Kwid, rencontre un vif succès en Inde, "même si nous sommes encore très petits" dans ce pays, selon M. Ghosn. Il vise une expansion en Iran, mais aussi en Amérique du Sud et en Russie au delà des accidents de conjoncture.
"Cela veut dire que Renault doit doper sa réputation dans les marchés émergents, et l'une des meilleures façons de le faire est la Formule 1", a assuré le PDG.
"Le centre de gravité de la Formule 1 s'est déplacé depuis quelques années de la +vieille Europe+ vers ces marchés émergents. C'est ce mouvement de bascule que Renault a détecté", souligne Bruno Bianzina, directeur général adjoint de l'agence de communication Sport Market, spécialisée en marketing sportif.
- Ventes de voitures sportives -
La Chine, premier marché automobile mondial, s'éveille à la F1, confirme Tim Urquhart, analyste en chef du marché automobile au sein du cabinet IHS. "Le marché des voitures sportives est en train d'exploser en Chine, qui devient de plus en plus un pays d'amateurs d'automobiles", explique à l'AFP cet ancien journaliste de F1.
Pour la firme de Billancourt, remarque M. Urquhart, la F1, avec ses monoplaces hybrides, est cohérente avec sa "stratégie technologique au sens large, être le leader mondial des voitures électriques" via l'alliance avec Nissan.
Et le retour de Renault "représente une stratégie autour de la compétition qui va soutenir les ventes de voitures sportives portant le label RS", espère Jérôme Stoll, président de Renault Sport F1, en évoquant un doublement des volumes écoulés d'ici trois ans. Sans parler de la résurrection de la "berlinette" Alpine, annoncée le mois dernier, qui s'inscrit dans la même philosophie.
Renault, qui n'était plus que motoriste ces dernières années, reprend pleinement le contrôle de son image. "Lorsque vous développez des moteurs, vous avez le privilège d'être oublié lorsque vous gagnez et d'être mis en valeur lorsque vous perdez", grinçait M. Ghosn fin juin 2015.
Reste la question de l'investissement, qui serait d'environ 300 millions d'euros pour 2016. Important dans l'absolu, mais sans doute tempéré par des contrats publicitaires et les accords confidentiels conclus sur les droits commerciaux de la F1.
"Ce n'est pas comme si Renault allait devoir mettre beaucoup d'argent", estime M. Urquhart, parlant d'opération financière "quasi blanche".
Et 300 millions, c'est peu ou prou le budget publicitaire de l'entreprise en France, mais pour un public potentiel de 400 à 450 millions de téléspectateurs de Formule 1 dans le monde, remarque M. Bianzina.
Bémol: à terme, "il faut que les résultats sportifs soient quand même au rendez-vous", prévient-il. Pour tirer pleinement parti des retombées, "il va falloir que Renault soit à la hauteur de sa légende dans le sport automobile".